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De la concurrence à la coopération : les nouvelles dynamiques des services financiers avec Aurélien Viry

Aurélien Viry
September 30, 2024
5 min
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Aurélien Viry (PDG de Société Générale Factoring) explique comment la réglementation et la technologie ont permis l'émergence de nouveaux acteurs dans les services financiers. Selon lui, banques et fintechs doivent continuer à avancer ensemble, en utilisant les cadres réglementaires comme levier pour réussir.

Il existe une idée reçue dans le domaine de la finance : les fintechs seraient là pour bouleverser les banques. En réalité, elles n’ont pas la même vocation et ne devraient pas chercher à le faire.

Cette confusion s'accompagne de trois autres idées bien connues :

  • Les banques sont trop anciennes et trop lentes pour innover.
  • Les réglementations ne font qu’étouffer la croissance.
  • Les fintechs sont freinées par ces deux facteurs et doivent prendre de gros risques pour réussir.

La réalité, c’est que banques, fintechs et cadres réglementaires coexistent généralement bien. Chacune de ces entités prend tout son sens en présence des autres.

Je veux dépasser l’idée selon laquelle les fintechs viendraient perturber les banques, ou que les réglementations seraient un frein pur et simple à l'innovation. Comme je vais l'expliquer, si banques et fintechs peuvent collaborer harmonieusement et intégrer l'environnement réglementaire, tout le monde en sortira gagnant.

Contexte : les grandes transformations du secteur bancaire

Au cours des dernières décennies, trois grands moteurs de changement ont émergé : la déréglementation, la re-réglementation et la technologie.

La déréglementation

On parle souvent des réglementations et des frustrations ou limites qu’elles créent. Pourtant, le cadre réglementaire actuel n’a rien à voir avec celui d’il y a à peine 35 ans.

En France, par exemple, le financement était encadré par l’État. Chaque banque disposait d’un quota de prêts à accorder. Les marchés financiers étaient restreints et peu profonds, et les marchés publics rares. Ce cadre semble difficile à imaginer aujourd’hui.

Tout cela a changé dans les années 1980. Les banques ont été privatisées et de nouvelles classes d’actifs, comme les produits dérivés, ont vu le jour et ont commencé à être échangées. Cette vague de déréglementation a dynamisé l’industrie financière. Avec l’émergence d’un marché des dérivés, il est devenu possible de gérer les risques, de créer des produits de couverture pour les entreprises et de nouveaux produits d’investissement pour les particuliers.

Il est donc important de se rappeler, lorsque l’on observe le rythme d’innovation dans le secteur financier, que ce changement a été essentiel. Nos services actuels ne seraient qu'une fraction de ce qu'ils sont sans cette transformation.

La technologie

La technologie a, bien sûr, eu un impact considérable. Quand j’ai commencé, il n’y avait ni e-mails, ni smartphones, et très peu de calculs de données. Excel n’était même pas généralisé. Cette évolution technologique a été continue et elle ne fera que s'accélérer.

L'industrie financière a su tirer parti de ces nouvelles technologies, qui ont totalement redéfini l’éventail des produits que nous proposons, les méthodes de gestion des risques et, bien entendu, nos interactions avec les clients.

Aujourd'hui, l'accent est mis sur l’intelligence artificielle générative (GenAI), et qui sait quelles seront les prochaines évolutions ?

La re-réglementation

En parallèle de cette innovation rapide, de nouvelles réglementations ont vu le jour, notamment pour combler les lacunes laissées par la déréglementation initiale. C’est un cycle perpétuel : les gouvernements assouplissent les règles pour favoriser la croissance et l’innovation, puis introduisent de nouvelles règles pour éviter les dérives.

Je ne vois pas cette re-réglementation comme positive ou négative en soi. Les nouvelles réglementations ont permis l’entrée de nouveaux acteurs sur le marché — fintechs, shadow banking, initiation de paiements. Ces nouveaux venus favorisent l’innovation, améliorent le service aux clients, renforcent la concurrence et font baisser les prix. Beaucoup de ces avancées sont le fruit d’interventions étatiques dans les pratiques financières.

L’Union européenne, par exemple, a cherché à stimuler la concurrence. Autrefois, les entreprises devaient utiliser la technologie fournie par leur banque. Changer de banque impliquait donc un changement de technologie, ce qui décourageait la plupart des entreprises et tuait la concurrence.

Les nouvelles réglementations ont simplifié ce processus pour les clients : ils peuvent désormais obtenir le meilleur service auprès de différentes banques.

Les nouvelles règles sur la facturation électronique vont également dans ce sens. Plutôt que chaque banque ou entreprise utilise ses propres processus, générant ainsi une perte d'énergie et des coûts importants pour les fournisseurs et les abonnés, nous allons vers une norme globale.

Cela profite bien sûr à l’État, qui pourra plus facilement collecter la TVA, mais cela simplifiera également le paiement, l’envoi et la gestion des factures pour les entreprises. On peut s'attendre à des gains de productivité réels, à une réduction des délais de paiement et à une diminution des relances.

La standardisation est une bonne chose. Au final, les réglementations actuelles ont ouvert l’industrie au profit des consommateurs, tant en termes de services que de prix.

Coexistence et collaboration entre banques et fintechs

Malgré l’émergence de nouveaux acteurs et de nouvelles technologies, le secteur bancaire reste très concentré. En France, sept ou huit banques détiennent environ 85 % des dépôts de détail. De nombreuses banques cherchent à servir tous les types de clients — particuliers, fortunés, PME, grandes entreprises, investisseurs et assureurs.

Les banques ne pourront pas éternellement tout faire pour tout le monde. Les plus grandes d’entre elles cherchent aujourd’hui à se simplifier et à se recentrer — d’autant plus que la réglementation est contraignante et coûteuse. Les banques privilégient aujourd’hui l’agilité et la priorisation.

HSBC a choisi de se désengager de certains marchés et produits. Citi fait de même aux États-Unis. Chez Société Générale, nous suivons la même stratégie : nous nous concentrons sur les domaines dans lesquels nous excellons et nous désinvestissons dans d'autres.

Cela ouvre la voie à d'autres acteurs pour gagner des parts de marché.

Le défi des banques

Le secteur bancaire est l’un des rares secteurs où distributeurs et producteurs sont une seule et même entité. Nous fabriquons nos produits, nous les traitons, puis nous les distribuons à nos clients, ce qui complexifie le processus.

De la même manière que le fait de servir un marché trop large nuit aux banques, produire chaque nouveau produit en interne est un frein. Les banques peuvent être lentes à reconnaître le besoin de changement, et le développement de nouveaux services peut prendre du temps.

Dans le même temps, la technologie fait croître les attentes des consommateurs. Le niveau d'exigence s’élève. Les banques doivent désormais s’intégrer à de nombreux systèmes et références externes, ce qui représente un investissement majeur, en temps et en argent.

Ainsi, même si les banques souhaitent simplifier leurs offres, les clients n'accepteront pas des services basiques.

Le rôle des fintechs

Les nouvelles opportunités résident dans l'architecture ouverte — le Banking-as-a-Service. Les banques peuvent se concentrer sur la distribution de certains services et laisser les fintechs et les nouveaux acteurs en être les producteurs. Les banques pourront ainsi proposer ces nouveaux services à leurs clients, même si ces derniers ont été créés et traités par d’autres.

Libérées des contraintes héritées, les fintechs sont excellentes pour mettre en place de nouveaux services à partir de zéro. Elles se concentrent sur des segments de clientèle et des cas d'usage spécifiques, plutôt que d’essayer de tout faire. Si elles tentaient de tout couvrir, elles deviendraient elles-mêmes des banques et se retrouveraient face aux mêmes complexités.

Il existe donc de réelles opportunités pour les fintechs de proposer des services plus efficaces et moins coûteux dans des domaines spécifiques, devenant ainsi des prestataires spécialisés et optimisés.

C’est là qu’elles deviennent intéressantes pour les banques. Si les fintechs peuvent offrir ces services spécialisés tout en laissant aux banques le soin de les distribuer, cela constitue un produit que les banques n’ont pas besoin de développer et de maintenir elles-mêmes.

Comment intégrer banques et fintechs

L’objectif doit être de collaborer, et non de se concurrencer. Il s’agit d’apporter de la valeur ajoutée à chacun, plutôt que de se nuire.

L'avantage, c'est qu'avec l'open banking et notre cadre réglementaire actuel, banques et fintechs peuvent travailler en harmonie pour le bénéfice de tous. Les clients peuvent continuer à faire confiance à leurs banques tout en accédant aux services les plus innovants, tandis que banques et fintechs peuvent proposer de nouveaux produits à un large public.

Un exemple concret est celui des fintechs qui fournissent des technologies « agnostiques des banques ». Elles développent des plateformes B2B accessibles tant aux entreprises qu’aux banques. Les entreprises peuvent ainsi changer de banque facilement, sans interrompre leurs processus internes, leurs données ou devoir lancer des projets informatiques. L'avenir est prometteur pour tout le monde.

Il existe un véritable avantage à ce que ces deux mondes travaillent main dans la main.

Moins de perturbation, plus de partenariat

Pour conclure, revenons sur les idées initiales :

  • Les banques sont trop anciennes et trop lentes pour innover. C’est vrai que les banques qui cherchent à servir tous les clients et à proposer tous les produits rencontrent de nombreuses complexités et priorités concurrentes, ce qui peut les ralentir. Mais les banques deviennent de plus en plus agiles — et les partenariats avec les startups et fintechs leur permettent d’accélérer le mouvement.
  • Les réglementations freinent la croissance. Il est vrai qu’un excès de réglementation peut être contraignant. Cependant, nous devons aussi reconnaître que les réglementations ont favorisé la concurrence, diversifié les services, instauré l’open banking et, bien sûr, contribué à la réduction des risques à l’échelle mondiale. Les règles évoluent constamment, généralement en réponse aux besoins et à la protection des consommateurs. Les entreprises doivent comprendre cela et s'y adapter.
  • Les fintechs sont freinées par les réglementations et les banques. Si l’objectif des fintechs est de remplacer entièrement les banques, elles sont vouées à l’échec. En revanche, si elles comprennent qu’elles sont productrices et que les banques sont leurs distributeurs, elles peuvent prospérer. Les banques disposent d'une large clientèle et doivent pouvoir proposer les meilleurs produits, qu’ils soient internes ou issus du marché. Les fintechs capables de développer ces produits et de collaborer avec les banques pour les distribuer ont un potentiel de croissance immense.

Si cette collaboration est bien gérée, tout le monde en profitera. Les banques deviendront plus agiles, tout en continuant à ajouter de nouveaux services et à élargir leur clientèle. Les fintechs, quant à elles, seront à l’avant-garde des grandes innovations et pourront diffuser rapidement de nouveaux produits à grande échelle.

Et les consommateurs bénéficieront de l'excellente expérience à laquelle ils s'attendent, tout en étant protégés par les règles et réglementations nécessaires. Continuons à encourager la coopération plutôt que le conflit.

À propos d’Aurélien Viry

Aurélien Viry est PDG de Société Générale Factoring, qui propose des services de financement aux PME et grandes entreprises. Il possède plus de 30 ans d’expérience dans le secteur bancaire, dont 22 ans à la Société Générale. Il a occupé divers postes, notamment dans le conseil interne, en tant que directeur des opérations d’une société de financement, directeur des risques d’une banque de détail, et plusieurs années sur les marchés de capitaux.

Aurélien a vécu et travaillé en Europe, en Asie, en Amérique du Nord et en Amérique centrale. Il attache une grande importance à la diversité des rôles et des expériences culturelles qu'il a accumulées tout au long de sa carrière.

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