Albane de Vauplane est Partner au Boston Consulting Group, où elle est chargée de la partie Paiements et Fintechs. Forte de sept ans d’expérience dans les services financiers, elle s’impose comme référente sur la finance embarquée et est convaincue que les plus grandes opportunités sont encore à venir.
La finance embarquée : un marché en pleine accélération
La finance embarquée est en train de transformer le paysage du BFR. Et pour cause : le marché croît de 50 % par an, et les plateformes qui s’y engagent voient leur chiffre d'affaires multiplié par quatre. Ce n’est pas seulement une histoire de croissance, c’est une réécriture du modèle financier de l’intérieur.
Chez BCG, nous étudions ce phénomène de près depuis plusieurs années. Intégrer le paiement, le crédit ou l’assurance directement dans les outils métier, ce n’est pas une simple évolution : c’est un changement de paradigme. La vraie question n’est plus “si” cette tendance va s’imposer, mais “qui” prendra le leadership… et “qui” restera à la traîne.
Mon entrée dans la finance embarquée
Je n’ai pas commencé dans la finance. J’ai travaillé dans l’industrie, le private equity, l’investissement – jusqu’à ce que je sois placée sur un projet “paiement”. Et là, déclic.
J’ai découvert un secteur ultra dynamique, complexe, où chaque jour apporte un nouveau challenge. Ce qui n’était qu’une petite équipe en 2017 est devenu l’un des pôles les plus solides de BCG à Paris.
Où en est la finance embarquée ?
Résultats :
- Le marché croît de 50 % par an.
- Les plateformes proposant de la finance embarquée multiplient leur chiffre d'affaires par 4.
- Les PME sortent du modèle bancaire traditionnel pour explorer de nouvelles options.
Mais au-delà des chiffres, le vrai changement est structurel : la finance embarquée donne accès à des outils qui étaient jusqu’ici réservés aux grandes entreprises. Elle redéfinit la gestion de trésorerie, l’accès au crédit et la couverture du risque pour les PME.
Le capital embarqué : prochaine étape
Aujourd’hui, la finance embarquée est encore très centrée sur les paiements. Mais c’est loin d’être une fin en soi. Presque toutes les PME utilisent une solution de paiement. Pourtant, peu de ces solutions offrent un vrai service financier intégré.
Cela représente une opportunité énorme, notamment pour les ERP. Si la finance n’est pas encore intégrée dans leur produit, ce n’est plus qu’une question de temps.
Prochaine étape : le financement. Intégrer le crédit dans les outils utilisés au quotidien (financement de factures, leasing, gestion de trésorerie...) pour le rendre fluide, invisible, accessible.
Prenez un commerçant français qui sécurise 50 000 € de BFR directement dans son outil de caisse, en moins de 24h. Il peut réapprovisionner ses stocks avant un pic de demande. Ce n’est pas juste pratique, c’est vital.
Ou une startup logistique qui accède à un financement de factures en temps réel depuis son logiciel d’achats : elle peut raccourcir son cycle de conversion de cash de 10 jours. C’est un levier de croissance immédiat.
L’accélération par l’IA
Ce qui va vraiment accélérer cette transformation ? L’intelligence artificielle.
En un an, on est passé d’un intérêt prudent à des investissements massifs des institutions financières. Ce ne sont plus seulement des entreprises comme Klarna ou Defacto qui construisent leurs modèles en IA : les banques traditionnelles s’y mettent sérieusement.
Les défis sont réels :
- Infrastructures héritées qui freinent l’innovation.
- Contraintes réglementaires.
- Changement culturel profond à mener dans les équipes.
Mais l’impact est déjà là :
- Productivité en hausse (workflows automatisés).
- Meilleure gestion du risque et de la conformité (GenAI, reporting...).
- Nouveaux produits sur-mesure.
Ce que je trouve le plus enthousiasmant ? L’IA est une opportunité pour les banques régionales ou spécialisées. On parle toujours des 20 plus grosses banques européennes. Mais derrière, des dizaines d’acteurs plus petits ont les mêmes défis, sans les mêmes moyens.
Grâce à des partenariats intelligents avec des fintechs qui apportent des solutions IA plug-and-play, ces acteurs peuvent sauter une génération et redevenir compétitifs.
Le futur est dans la collaboration
La finance embarquée évolue vite, et l’IA en décuple l’impact. Mais les vrais gagnants seront ceux qui sauront collaborer.
- Les banques ont la confiance, le capital, l’expertise réglementaire.
- Les fintechs ont l’agilité, l’expérience utilisateur, et la capacité d’innovation rapide.
Ensemble, elles peuvent :
- Créer de nouveaux modèles économiques.
- Proposer des produits financiers plus intelligents.
- Redéfinir la relation client.
Les exemples existent déjà : HSBC et Tradeshift sur le financement fournisseur, BBVA et Uber sur les services embarqués… La logique n’est plus la concurrence, mais la co-construction.
Les institutions qui miseront sur des collaborations IA-first auront une longueur d’avance dans la prochaine révolution financière.